Sauver son cœur d’enfant, c’est trending
Le hobby est doté de vertus de résistance surprenantes face à l’anxiété ambiante.
J’allais aborder le sujet le plus déprimant du monde, celui dont on mesure désormais clairement les conséquences pour le futur de cette planète : la désinformation.
Je voulais revenir sur le repositionnement de Meta, puis zoomer sur les migrations d’usagers vers des espaces numériques plus civilisés, mais… argh, j’ai eu envie de zoomer sur du positif et de l’inspirant.
Comme cette tendance prometteuse sur les médias sociaux en 2025 : le passe-temps (hobby).
Une pratique pas si nouvelle, mais dotée de vertus étonnantes pour résister à l’anxiété ambiante.
Sauver son cœur d’enfant pour devenir un adulte résilient
Scan Club publiait la semaine dernière ses prédictions sur les attentes des usagers de plateformes sociales en 2025. Plein de bonnes pistes là-dedans, comme l’impératif no bullshit à l’ère des comptes FB et IG générés par l’IA – l'imperfection humaine est recherchée – et le besoin de connexions sociales authentiques sur des plateformes qui veillent au bien-être de leurs usagers.
Je retiens surtout la « tendance no 4 » : les audiences veulent avoir du fun.
On parle de jeux, de sports, mais aussi de tout ce qui éveille la curiosité et nourrit les passions, dont la pratique ou l’apprentissage d’un hobby.
In 2024, digital audiences were desperate for a real-life thrill. This, combined with the need to combat digital fatigue and escape the state of the world, has led to a general resurgence of fun being a top priority.
People are taking time to learn hobbies, explore passions, and live creatively. Essentially, they’re looking for longer-term strategies to make life enjoyable. There’s a movement away from overstimulating content and toward discovering real passions.
Je sais que pour plusieurs, avoir un passe-temps sert justement à passer le temps en mettant son cerveau à off, et c’est très bien. Or, si j’ai mentionné ses vertus de résistance, c’est parce que les bienfaits d’une simple activité de loisir méritent d’être pris un peu plus au sérieux.
Quelques études : ici, on a démontré que la pratique d’un art permettrait de réduire drastiquement le niveau de cortisol, l’hormone du stress. L’attention est dirigée vers l’accomplissement de la tâche manuelle, aidant ainsi l’esprit à se libérer des tourments et à demeurer dans le moment présent.
Ici, on révèle que la pratique d’une activité de loisir, surtout lorsqu’elle est physique, influence positivement le niveau d’énergie. Ça fait du monde moins fatigué.
Mais le retour sur investissement le plus sous-estimé, à mon avis, est qu’il permet d’enrichir l’identité personnelle en y ajoutant des couches d’intérêts cultivées en dehors du travail. On apprend à mieux se connaître, on se découvre un talent, et on se définit autrement que par son identité professionnelle.
Simone Stolzoff s’est penché sur la définition du succès dans The Good Enough Job. Il revient souvent sur le rôle du passe-temps pour définir ses préférences, plutôt que de laisser les autres le faire à notre place.
Diversifying our identity is about more than mitigating the shock of losing our job. [...] It allows us to contribute to the world in different ways and to develop a sense of self-worth beyond the economic value we produce.
Ironiquement, des recherches ont montré que les personnes qui entretiennent des passions et des intérêts après le boulot sont des travailleurs plus productifs. Malheureusement, peu d’entreprises abordent le concept d’équilibre travail-vie personnelle à l’aune de celui de l’enrichissement travail-vie personnelle.
Le hobby en temps de crise
La pratique d’un passe-temps peut également être valorisée pour son utilité, comme le développement de son autonomie.
C’est ce que suggère Thom Strizek, un homme qui collectionne les passe-temps utiles » comme le travail du bois, la réparation d’ordinateurs et d’automobiles, la fabrication de fromages et l’écriture, entre autres choses. Outre une passion manifeste pour le travail manuel, pour lui, la pratique d’un hobby libère de l’emprise atrophiante du solutionnisme numérique.
The world will be saved by hobbyists! All you have to do is to live without what this smartphone represents.
Pour la petite histoire, le passe-temps, en tant qu’activité de loisir, serait apparu autour de la deuxième révolution industrielle, alors que les travailleurs et travailleuses souhaitaient créer un trait d’union entre le travail et la vie personnelle.
Lors de la Grande Dépression, certains passe-temps se sont transformés en activités monétisables. À la recherche de nouvelles sources de revenus, certaines personnes ont commencé à vendre leurs talents : faire du pain, construire un cercueil, faire des conserves, etc. On peut dire que ce sont les ancêtres des créateurs de contenu d’aujourd’hui!
Est-ce qu’on pourrait voir un nouvel essor du passe-temps en tant que revenu d’appoint – ce qu’on appelle side hustle – dans le contexte économique incertain? La tendance autrefois appelée Moonlight est observée depuis un moment aux États-Unis et commence à gagner du terrain au Canada.
Si pour beaucoup, investir du temps dans un passe-temps doit forcément aboutir à une production tangible, les véritables bienfaits personnels se manifestent souvent lorsqu’on adopte une approche d’exploration, idéalement détachée de toute notion de rentabilité. Or, cela ne signifie pas que l’engagement passionné doive forcément s’éloigner de la productivité, car, au contraire, il contribue parfois à enrichir des connaissances pointues grâce au dévouement des hobbyistes.
Dans certains cas, la passion peut faire d’eux des héros, comme ce fut le cas des spéléologues qui ont sauvé les 12 jeunes Thaïlandais coincés dans une grotte en 2018.
Au final, l’important, c’est simplement de cultiver l’art de s’abandonner à une activité qui fait du bien. That’s it.
Si vous avez un passe-temps, parlez-m’en donc dans les commentaires. Je suis certaine que ça pourrait inspirer d’autres lecteurs.
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Claudia
Ces statistiques m'apaisent ce matin, merci de les partager. Je crois sincèrement que la créativité apporte une forme de bien-être. C'est rassurant de voir que de plus en plus de gens souhaite la cultiver. Merci pour ce texte!
Merci beaucoup pour votre texte ce matin, il m'a apporté une belle petite dose d'optimisme. :) Oui à une vie imparfaite et humaine, en chair et en os, où l'on développe nos talents manuels et suit nos passions. Ça me fait penser à une femme, Barbara Sher (décédée maintenant), dont j'adore la perspective et le travail qu'elle a fait pour aider les gens de type "multipotentiel" ou "Renaissance wo/man" à faire un tout cohérent de leurs multiples passions; ou encore au merveilleux et très pragmatique livre “The Renaissance Soul: Life Design for People with Too Many Passions to Pick Just One” de Margaret Lobenstine, qui vise le même but. Je vous les recommande chaudement, et certains livres de Barbara Sher ont été traduits en français. Bonne journée à vous, et merci encore!